Quelque part sur la route

En transit, en transhumance, en escale, exil, exode... Après quelques heures de baignade en mer d'Orient hier, nous avons embarqué dans un bus pour Hô Chi Minh Ville, perspective de 24h de route vers le sud... Demain, le 12, nous devons quitter la terre vietnamienne, faute de visa, et renoncer à la découverte du delta du Mékong, pourtant tant attendue... C'est cette compagnie de transport, à Ninh Binh, qui a décalé nos prévisions en nous débarquant une première fois... Et aujourd'hui, après moult arrêts, à 4 heures du matin, juste au moment où la télé locale rediffuse le match de foot et où nous apprenons que la France vient de s'incliner contre le Portugal, le bus nous débarque à Nha Trang, ville intermédiaire, quelque part entre Hoï An et Saïgon... Nous devons changer de véhicule, mais le suivant n'arrivera que dans quelques heures... et nous espérons y avoir des places ! 

 

Bien, quelques heures plus tard, je reprends... pas moyen d'obtenir des places dans le bus, alors que nous étions sensés être conduits jusqu'à Saïgon... Prochain départ à 21h, après notre nuit presque blanche, avec une arrivée aléatoire vers 7h30 du matin, et nous devons prendre un autre bus à 8h, 10h de route encore, pour passer la frontière du Cambodge, et aller jusqu'à Phnom Penh... Dernier recours : le train. Avec beaucoup de chance, nous trouvons 5 places dans le train de 6h55... ouf ! J'écris donc en regardant défiler les rizières et plantations d'arbres à fruit du dragon... Le wagon est climatisé, nos 9h de route sont donc protégées des 45 degrés ambiants, qui nous assaillent et nous collent à la peau dès le matin, ralentissant nos gestes et conditionnant nos journées...

 

Nous quitterons demain le Viêt Nam avec une drôle d'impression. Ce pays est pudique, et ne se livre pas si facilement. Sentiment d'avoir raté sa rencontre, d'être passés à côté de ce que nous pouvions nous offrir mutuellement. D'être restés sur des malentendus. Une faim encore grande me tenaille, de découvrir d'autres visages de ce beau pays, la certitude de n'en avoir goûté que ce qui se laisse saisir d'emblée, loin des chemin de traverse. L'insatisfaction de n'avoir eu avec les vietnamiens que des rapports superficiels régis par des relations marchandes, et de n'avoir pu aller au delà... La fatigue de journées de transport, de villes grouillantes, vibrantes, frémissantes, d'une chaleur torride, d'une pollution dense.... L'intuition que le régime politique draconien auquel sont soumis les vietnamiens, la politique des deux enfants maximum, les horreurs des guerres successives, l'absence de nuances d'un parti devenu totalitaire... ne suffisent pas à expliquer cette impossibilité de se rencontrer, je veux dire de se rencontrer vraiment, d'échanger, de partager, sans que des enjeux économiques ne viennent entraver le lien, le pervertir... sans que l'on soit suspicieux, ou méfiant, sans que la confiance puisse s'établir d'abord...

 

De Saigon, nous ne connaitrons presque rien... Moi qui rêvais de l'ambiance des écrits de Marguerite Duras, des grands espaces ouverts par le delta, de cette terre d'eau et de boue...

Juste pour le plaisir, quand même, quelques notes colorées...

Écrire commentaire

Commentaires: 3
  • #1

    Mamou (lundi, 11 juillet 2016 16:35)

    malgré tous ces aléas dans votre voyage, vous en garderez quand même un bon souvenir. Le Cambodge est à l'horizon
    bisous

  • #2

    tiline (mardi, 12 juillet 2016 08:00)

    En avant voyageurs! Essayez de profiter de ce qui vient même si ça ne vient pas tout à fait comme vous l'imaginiez!
    Courage pour les trajets et la chaleur!
    Une volée de bisous de france!

  • #3

    frederic (mardi, 12 juillet 2016 08:28)

    je ne te lis qu'épisodiquement... c'est une connerie, j'en conviens. dans ces lignes, dans TES descriptions, je retrouve tant de chose qui sont ancrées en moi, issues des mes voyages avant pendant et après avoir connu Mousse. Tu vas avoir du mal à retrouver la réalité française de 2016... mais peut être que non avec ce lien internet qui n'existait pas à mon époque, on garde finalement le contact... je le vois -sens, avec Maipù. je ne sais pas.. c'est si court 1 an, aussi. Et je te reverrai pas avant encore 1 an non plus. oui, j'ai envie de passez du temps avec toi, vous, pour partager ce que vous vivez, ce que nous avons en commun, à votre retour pour que nous retrouvions ensemble ces flash existentiels des autres mondes de notre planète que 90% des personnes que tu reverras, que vous retrouverez, chez vous, ne comprendront pas.... je t'embrasse très fort avec un fuerte abrazo à Ludo y los chiquillos. Que viaje, mierda ! il est à l'échelle de notre monde avec ses multiples différences et dimensions physiques, culturelles et politiques... je n'ai pas le temps d'exprimer le flot d'émotions que provoquent ta description du vietnam. c'est très fort. ca me renvoie à une autre époque.. je me rends compte que je n'ai jamais quitté mon habit de voyageur, me suis juste adapté pour me permettre, pour avoir le droit de vivre comme je le veux ici ou là-bas au chili. faut qu'on se parle mujer... we'll all have to wait then.. et puis la langue que tu utilises est aussi la mienne.. avec toutes ses nuances que tu utilises avec beaucoup de beauté mais simplement. bon je vous laisse. Keep on trucking, boys and girls.