Jardin impressionniste

Ce matin, nous avons imaginé comment aménager notre jardin, à Brindas. Par petites touches. Par impressions. Avec la certitude qu’il serait très beau. Jamais terminé, et très vivant. Et qu’il y manquerait toujours quelque chose, qui nous donnerait envie de continuer à en prendre soin…

 

Alors, je vous le dépeins. A l’entrée, on planterait un cocotier. Peut-être aussi un citronnier, un goyavier, un manguier, un papayer. Dans le fond, un lagon bleu turquoise, avec des raies, des requins, du corail et des dauphins. Bordé d’une plage de sable corallien rose, de sable blanc, de sable noir, et d’un platier avec de beaux coquillages. A côté, des montagnes acérées, très vertes, à la végétation luxuriante, et au relief accidenté, pleines de pics et de crêtes. Sur leurs flancs, des ukulélés et des colliers de tipaniers et d’hibiscus. Quelque part aussi, le Macchu Pichu des incas, le Tikal des mayas, et les huilpils brodés des femmes guatémaltèques. Les singes hurleurs, les singes araignées, les lémuriens, les lamas, les guanacos, les alpagas et les vigognes, le grand condor des Andes, les perroquets d’Amazonie, les colibris, peut-être aussi un tigrillo, mais seulement s’il ne mange pas nos poules. On s’est mis d’accord pour la Mitad del mundo, le Musée Interactif de Santiago, la cathédrale de Lima, l’arc Santa Catalina d’Antigua, la Plaza de Armas de Granada. Pour les volcans Chimborazo et sa glace, Masaya et ses fumerolles de soufre, Cerro Negro et ses flancs de cendre volcanique noire, Tungurahua et sa lave incandescente. Pour les îles du lac Titicaca, du lac Nicaragua, du lac Atitlan, de Moorea. Et pour l’atoll de Mataïva. On ferait une place pour les danses traditionnelles du Guatemala, d’Equateur, du Pérou, de Bolivie, de l’île de Pâques, et pour le haka Polynésien. On planterait un Moai (ou deux… on a vraiment aimé…) à l’entrée, vers le portail, avec quelques marchés colorés aussi, celui de Tarabuco avec ses tissus, celui de Sucre avec ses jus de fruits frais et ses têtes de vache pleines de mouches, celui de Masaya avec son artisanat sculpté, tressé, gravé, celui de Santiago avec son Pisco, celui de Papeete avec son monoï, celui de La Paz avec ses breuvages, feuilles de coca et fœtus de lama, celui de Riobamba avec ses fruits et légumes, celui de Calpi avec ses bestiaux.

 

Et puis, on a commencé aussi à imaginer qui ferait résonner notre jardin de ses rires et de sa voix… et alors là, le souvenir de tous les visages croisés, de tous les amis rencontrés, de toutes les discussions partagées, de tous les regards échangés… les fous rires, la complicité, ceux qui s’insurgent, ceux qui revendiquent, ceux qui expliquent, ceux qui accueillent, ceux qui conseillent, ceux qui écoutent, ceux qui rouspètent, ceux qui… Avec des prénoms aussi, certains familiers, d’autres plus exotiques, chacun associé à un visage, un moment partagé, une envie de se retrouver… Pour tout ce petit monde là, il nous faudra un grand jardin ! Heureusement que dans le sac à dos, c’est léger…

 

Alors, on a commencé à faire de la place pour tout ce qu’on a déjà oublié, et qui nous reviendra forcément, en cours de route. Et puis, pour tout ce qu’on n’a pas encore vu, rencontré, visité, goûté, découvert, admiré, regardé, écouté, essayé… on s’est dit que l’Opéra de Sydney, les pagodes de Bali, les marionnettes en peau de buffle du théâtre d’ombre de Jakarta, le poisson cru du Vietnam, les temples d’Angkor, la baie d’Halong, le delta du Mékong, les rizières du Laos, le Taj Mahal, la cité sacrée de Kathmandu, l’Himalaya, les moulins à prière tibétains, les cueilleurs de thé birmans, l’orphelinat d’éléphants thaïlandais…. trouveraient sans doute à se loger dans notre jardin. Avec, encore, une toute petite place pour tout ce qui n’est pas prévu, ce que l’on n’attend pas, les rencontres improvisées, inopinées, fortuites…

 

Le tout bien, sûr, sans faire de l’ombre aux rosiers brindasiens, aux lilas, aux cognassiers du Japon, aux magnolias, à nos cerisiers, abricotiers, pruniers, kiwis et autres fruitiers bien de chez nous, arrosés par l’eau de l’Yzeron…

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Ici, toujours...

Ici, on est réveillé à 4 heures par le chant des coqs, et le raffut des poules dans le citronnier et le manguier.

Ici, on marche pieds nus sous la pluie.

Ici, le dimanche, à l'église ou au temple, les hommes portent leur chemise à fleur, et les femmes une couronne de fleurs.

Ici, pour dire oui, il est coutume de hausser les sourcils.

Ici, on achète ses fruits et son poisson sur le bord de la route.

 

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Dépression tropicale

La seule route asphaltée de Moorea, qui dessine le contour de l'île, est noyée sous des ruisseaux boueux qui dévalent les pentes des montagnes, où les cascades se multiplient, sous l'effet des pluies torrentielles et incessantes... La saison devrait être sèche, mais les importants cyclones annoncés en février n'ayant finalement pas eu lieu, il semble que le climat ait perdu la tête ! De ces mers du sud, décor de cartes postales, nous découvrons l'envers du décor... L'isolement de chacune de ces 118 îles, la pauvreté matérielle (malgré le développement d'un tourisme de luxe) et culturelle (pas de musées, ni même de cinéma, les arts étant essentiellement vivants), les aspects climatiques extrêmes... Tous les petits chemins de terre qui quittent l'unique route pour conduire aux maisons sont creusés de profondes ornières inondées, plusieurs dizaines de cm d'eau stagnent dans les cocoteraies, attirant les moustiques par milliers, et l'on voit l'utilité des pilotis... A l'école, on trouve des anguilles dans la cour de récréation ! Les nuages cachent les cimes acérées et verdoyantes, le lagon s'est fondu avec l'océan, on ne distingue plus ni turquoise, ni indigo. On était parti pour randonner ce matin, pleins d'entrain, finalement, très vite le retour s'impose, c'est journée cartes postales, travail scolaire, jeux de société et lecture. On s'est pourtant habitués à ne pas interrompre nos activités pour une averse, mais là... Comme le dit Audrey, on se tropicalise... On va envoyer en France quelques kilos de coquillages...

 

Hier soir, invités chez Audrey et Thomas, on a réussi à mettre en ligne nos impressions de Mataiva au jour le jour, mais pas les photos... Dans notre location nous n'avons pas internet... Et dans 4 jours, nous débarquerons en Nouvelle Zélande, où nous voyagerons en camping car, sans possibilité d'accès au réseau non plus... Contre toute attente, il semble que l'Amérique latine nous ait permis d'être plus en lien que les îles à venir ! Mais, à presque 6 mois d'aventure, on apprend à ne pas tout maîtriser, à accueillir ce qui vient, les jours et les semaines sont variés, les découvertes quotidiennes, et plus on voyage, plus on a envie de voyager...

 

Ce soir, nous gardons Swan, Tao et Mia pendant que leurs parents vont à une fête. Soirée crêpes pour tout le monde ! C'est la fête, et une fois les 6 loupiots couchés, nous en profitons pour mettre en ligne quelques photos de Mataiva... dans les posts précédents.

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Mataiva, un atoll de l'archipel des Tuamotus...

Dimanche 17 avril

 

On prend le bateau de Moorea à Tahiti, où nous arrivons peu avant le Soltice, un monstre des mers qui déverse ses 3000 croisiéristes pour la journée à Papeete... nous profitons du marché artisanal installé pour eux, où Salomé s'achète le pendentif en dent de requin dont elle rêve depuis des semaines, puis du groupe d'artistes qui se produit sur le front de mer, danse, musique et chant traditionnels... avant de prendre l'avion pour Mataiva, un atoll de l'archipel des Tuamutus. 45 minutes de vol. Nous survolons Tetiaroa, l'atoll privé de Marlon Brando, aujourd'hui propriété de son fils, et accessible en voilier ou catamaran depuis Tahiti en 3h30 de navigation... une couronne de terre entre lagon et océan, que le gris du ciel et la couche de nuages ne nous permet pas d'admirer dans les meilleures conditions. Notre petit avion continue sur Rangiroa, et nous ne sommes pas nombreux à descendre à Mataiva. Il faut dire que les habitants sont 280 seulement, et qu'on n'y trouve que 2 pensions... Il y a 2 avions par semaine, le dimanche et le jeudi, qui relient l'atoll au reste du monde... si les conditions météo lui permettent d'atterrir ! 

 

Nous sommes accueillis avec le collier de fleurs de tiaré, et faisons la connaissance de Sarah, Priscilla et leur famille, ainsi que des autres vacanciers avec qui nous séjournerons sur cette bande de terre perdue au milieu du Pacifique. Lily, 6 ans, fraîchement débarquée de métropole avec ses parents pour les vacances de Pâques ; Marie, François et Julien, 3 fonctionnaires d'état qui vivent à Papeete depuis 2 ans, ainsi qu'une journaliste de Tahiti, présentatrice du Journal TV et reporter, venue ici pour filmer l'arrivée, mardi, de militaires dont la mission est de couper la seule forêt native qui reste sur tous les Tuamutus... Les enfants sont ravis de se faire une nouvelle copine, et les conversations entre les adultes sont riches et passionnantes. Le gouvernement polynésien, le statut des fonctionnaires, le mode de vie dans les atolls, la santé ici, la religion, le tourisme, la coprahculture, l'éducation et l'université... Chacun dispose de son faré, un bungalow en dur au bord du lagon, les repas sont pris en commun, et les activités et excursions également partagées. Le soleil se couche vers 18h et se lève vers 5h, nous vivons avec... Et puis, il est incroyable de réaliser que nous disposons du réseau wifi sur cet atoll éloigné de tout... bien qu'il nous soit impossible de consulter internet (et d'alimenter le blog...), les mails partent et arrivent, rendant l'isolement moins patent. A notre arrivée le ciel est bas et gris, le vent puissant, et malgré ça le lagon, vert émeraude, nous régale de ses nuances laiteuses... 

 

L'atoll est unique en son genre, composé de 70 vasques aux bleus variés, d'une profondeur maximum d'une dizaines de mètres, tenues prisonnières de la bande de sable plantée de cocotiers, et plus claires que l'océan environnant... les habitants vivent de coprahculture et de pêche, se nourrissent de coco et de poisson.

 

Lundi 18 avril

 

La journée s'annonce pluvieuse et le sera. Le début de matinée est consacré à l'apprentissage du tressage de vaisselle en feuilles de cocotier, réputée incassable et à usage unique. Tout le monde y arrive et donc aura le droit de manger à midi. Assiettes sous le bras, nous partons dans la benne du 4×4 pour parcourir les 16 km de piste qui longent une moitié de l'île. Le paysage hésite entre cocotiers et cocotiers, puis de ci de là quelques arbres feuillus, une végétation plus dense, puis à nouveau du coco. La piste est bien humide et nous arrivons au bout, sur l'une des passes de l'île. Nous pouvons traverser celle ci à la nage pour gagner l'autre rive où nous découvrons une forêt de ... cocotiers ! La pluie menace et la température de l'eau est presque plus élevée que celle de l'air.

 

Le repas cuit sur un feu de bois : pains de cocos et poisson du lagon, cru et cuit. On ne s'en lasse pas ! Le tout dégusté dans nos assiettes tressées sans stress. Après tous ces efforts et pour nous réchauffer de la pluie battante, nous retournons dans l'eau du lagon qui est nettement plus chaude. Arthur nage de plus en plus et Samuel et Salomé apprennent le poisson. 

 

Deuxième partie de l'après midi, nous partons en direction du platier où nous attend le rocher de la tortue. Celui-ci doit son nom à sa légende. Lorsqu'il y a des nuages qui ressemblent à une tortue, alors c'est le signe que des tortues marines vont venir pondre sur la plage. Nous marchons au milieu de millions de coquillages et faisons une récolte de porcelaines, opercules de coquillages, épines d'oursins crayon, demain atelier land art.

 

De retour à la pension vers 15h30, la journée s'étire entre vélo, discussion, kayak, blog, jeu, etc... bref, c'est pas facile, mais on assume ! J'espère que demain, ça ne sera pas trop dur.

 

Bleu. 

Cyan, marine, turquoise, émeraude, saphir... nacre, coco, corail... 

La richesse de la Polynésie, ce sont les polynésiens, les fleurs, le poisson cru et les plages. 

Le bleu. 

L'odeur chaude et humide du sel à plein nez.

Le fracas, tantôt doux tantôt assourdissant, de l'océan. 

Ce plat platier qui est le mien.

Le blanc des fleurs de tiaré, le rouge des fleurs d'hibiscus. 

Le grain du sable.

Brel et Gauguin, enterrés aux Marquises. 

 

A Maiteva, il y a une école primaire. Ensuite, pour le collège, il faut aller à Rangiroa. 20 minutes d'avion, 7 000 francs (environ 60 euros). Alors, les collégiens sont pensionnaires. Ils rentrent chez eux, à 20 minutes de vol, que 2 fois par an. Et pour la fac, c'est Papeete. 3 000 étudiants se partagent 17 disciplines, dont 950 en sciences économiques. 

 

En Polynésie, il y a la dengue hémorragique, le chicunguna, la gratte, ou cigätera. C'est cette algue qui envahit tout, touche toutes les îles... sauf Mataiva. Les poissons qui la mangent n'ont aucun signe extérieur de maladie, mais sont porteurs d'une toxine extrêmement dangereuse pour l'homme, et deviennent impropres à la consommation. Même les insectes, mouches et fourmis, ne s'en approchent pas quand ils sont contaminés...

 

Dans le petit avion, derrière nous, un vieux monsieur porte autour du cou une lourde croix. Sur l'atoll, pas de prêtre, seulement des diacres. Le serviteur de dieu vient pourtant rendre visite à ses ouailles. De temps en temps. Comme le firent les missionnaires en leur temps.

 

Pour la forêt endémique, on ne sait pas trop. L'association de défense de l'environnement ne semble pas faire le poids. Officiellement, les militaires viennent pour entretenir les plantations de coco, dégager et élargir la piste. Peut-être aussi pour sensibiliser les iliens. A quoi ? Pas aux espèces végétales natives en voie de disparition... 

 

Il y a aussi les 70 gisements de phosphates. Les habitants de l'atoll ont obtenu qu'ils ne soient pas exploités. Pour combien de temps ?

 

Le géant Tu, l'une des divinités du panthéon tahitien, aurait son trône sur le marae Papiro.Trône de nacre.

 

Un pont relie les 2 rives du village de Pahua, que séparent quelques mètres de chenal. Des séchoirs à coco sur terre, des parcs à poisson en mer.

 

En langue tahitienne, Mataiva signifie "9 yeux", en référence aux 9 chenaux qui relient les différentes passes de l'atoll. 

 

Aujourd'hui, une pluie diluvienne remplit enfin les citernes. Quand elles sont vides, ne reste que l'eau saumâtre pour se laver, et les habitants de l'atoll ont des problèmes de peau... Il pleut très peu ici, à peine quelques jours par an, et bien sûr, aucune source, aucune rivière, aucune nappe phréatique... Nous avons de la chance, le ciel nous souhaite la bienvenue. D'accord, mais on aimerait quand même bien pouvoir admirer ces couleurs inimaginables qui sont celles du lagon d'habitude, et que nous n'avons vues qu'en photo... Les moustiques attaquent par nuées vrombissantes, et les crabes fuient sous les pas. Les bernards lermites marchent en crabe ! La pluie battante rebondit sur la surface laiteuse du lagon, en petites perles blanches et brillantes, qui scintillent avant d'être englouties par le sel. La différence de température est saisissante. L'eau du ciel est froide, tandis que celle de l'océan est chaude. Le spectacle est de toute beauté, les cocotiers ploient, l'eau blanchit, ciel et mer se mélangent, se confondent, se salent et se déssalent, tressent et nouent les éléments ensemble. Le monde devient liquide. La cocoteraie est spongieuse, la voiture amphibie, on ne sait plus exactement où commence la terre et où s'arrête la mer, puisque le ciel s'en mêle... Et ça dure. Un peu. Beaucoup. Jusqu'à ce que la lumière se fraye de nouveau un chemin dans le ciel obscurci, ramenant le jour sur terre. 

 

Rêve de bleu.

 

Ce soir, pas une étoile. Même la lune se cache. Et, comme le dit Salomé, Arthur dort en position "fatale"...

 

Mardi 19 avril

 

Mon coeur pleure... Le dernier bilan du tremblement de terre en Équateur fait état de plus de 400 morts, et de 2 000 blessés. La ville de Manta a été détruite à 80 %, et 10 provinces ont été touchées. 7,3 degrés sur l'échelle de Richter, le séisme le plus meurtrier depuis 50 ans. Nos amis tentent de contacter leurs amis... Merci de vos nombreux témoignages de solidarité et de soutien, auxquels nous sommes sensibles et que nous transmettons... On se sent bien petits !

 

Ici, nous faisons connaissance avec les pluies tropicales polynésiennes. Chaudes comme une mousson, violentes et soudaines, capricieuses et bruyantes, le verbe haut et le trait fulgurant, à faire cabrioler le lagon. 2 heures d'éclaircies ce matin, le temps de mesurer la transparence et la luminosité de l'eau en traversant quelques unes des 70 vasques réticulées qui caractérisent l'atoll.

 

Un arrêt au parc à poisson, pour y pêcher notre repas de midi, un arrêt sur le nombril de Mataiva, affleurement de corail au coeur du lagon, un arrêt sur l'île aux oiseaux, où nous rencontrons sternes, frégates et fous de bassan à pattes rouges par dizaines, raies pastenagues et requins à pointe noire dans 20 cm d'eau claire... Notre embarcation file sur un motu (petite île) pour y faire griller les carengues leurres passées directement de la nasse à la glacière, et nous nous baignons avant de remplir les feuilles de cocotier (non tressées aujourd'hui) qui nous tiennent lieu d'assiettes... Nous avons le loisir d'observer longuement des murènes, venues goulûment finir nos restes, des oursins violets aux longues épines, des mulets, des bagnards, des poissons perroquet, des poissons réglisse, et des tas d'autres merveilles de la nature... La couleur de l'eau, ou plutôt des eaux, même sous un ciel noir et chargé, est tout simplement extraordinaire. Laiteuse, lumineuse, s'essayant à toutes les nuances de bleu et de vert. Plus claire que le ciel.

 

Dans l'après-midi, de retour à la pension, lessivés, rincés, essorés, atelier confection de colliers de coquillages. Ça tombe hien, c'est bientôt la fête des mères, et Salomé décore sa lettre pour inviter Lily à son anniversaire, demain...

 

Ce n'est pas encore ce soir que nous pourrons regarder le soleil se coucher, ni les étoiles... Tonnerre et éclairs font vibrer l'île de leurs détonations tonitruantes, amoureuses déclarations de l'océan à la terre, et du ciel au lagon.

 

Mercredi 20 avril

 

Ciel terne, hésitant. Le soleil n'est pas loin. Hier, nous avons observé l'étrange balai du cargo qui dessert l'atoll. Chargé comme un baudet, un cargo mulet. Un gros bateau qui reste au large du récif pendant que la barge de transport fait le va et vient pour emmener et ramener les marchandises. La mer était grosse, faisant valser la feraille de la poupe à la proue. Le bateau impatient fait des ronds dans la tourmente. Ça charge, ça décharge tout le nécessaire pour la vie de l'atoll. Essence, bicyclettes, piles au lithium, fruits, légumes, viande.

 

Le soir, des trombes de pluie orageuse s'abattent sur l'atoll, les vagues sont immenses. Chacun raconte les tempêtes, cyclones, tsunamis qu'il a connus. L'atoll est régulièrement traversé par des vagues trop fortes pour se casser sur le récif. Il faut alors aller sur les toits des maisons, à l'école qui est le bâtiment anticyclonique construit sur pilotis ou bien grimper au cocotier comme on dit ici ! Puis, on attend que ça passe. 

 

En 1998, un cyclone a ravagé l'atoll, qui a été entièrement reconstruit. Une école superbe, devenue le refuge en cas de dépression tropicale, une station EDF, avec son générateur, des citernes de récupération d'eau de pluie, et des maisons individuelles en tôle ou contreplaqué. L'école, la mairie et les 2 pensions, qui accueillent des touristes, sont les seules constructions en dur.

 

Aujourd'hui, on nous parle de la coprahculture, activité qui ramène 80 % des ressources de l'atoll. Ici, chaque parcelle de cocotier appartient à quelqu'un. 15 familles vivent ici, qui se partagent la terre. La coprahculture c'est, pour ainsi dire, l'élevage de la noix de coco de la graine jusqu'au monoï en passant par le pain de coco et l'huile de coprah. Les noix sont exploitées sur l'atoll. Ramassées, fendues, vidées de la chair blanche du coco que l'on mettra à sécher avant de les conditionner en sacs de 25 kilos. Les sacs sont vendus au "magasin" du village, qui les vend au cargo, qui les vend à l'huilerie de Tahiti, qui fait du monoi et autres produits. Le cocotier donne des fruits toute l'année. Le travail se fait par périodes de trois semaines pour rentabiliser. Deux coprahculteurs arrivent à extraire 5 tonnes de noix séchées dans ce temps, vendues 3 500 francs le sac de 25 kilos. 

 

Ensuite, nous poursuivons l'exploration de l'atoll. Nous partons en 4x4 en direction d'une plage que nous trouverons... sous l'eau. Avec la marée et la pluis d'hier, le lagon s'est rempli. Nous marchons loin avec de l'eau jusqu'à la taille, alors que nous devrions être sur le sable ! Cela ne nous empêche pas de nous baigner. La suite de la journée se partage entre promenade sur le platier, ramassage de coquillages, plouf dans l'eau et découverte de l'épave de l'atoll. Au milieu de la cocoteraie se trouve la carcasse de bateau chilien, toute rouillée, envahie de végétation. Les habitants savent qu'elle est ici depuis 1906. A cette époque l'atoll n'était pas habité (on n'avait pas le droit). Les gens venaient 3 mois par an pour la coprahculture et repartaient sur Rangiroa. En 1906, lorsqu'ils sont arrivés il y avait une épave de bateau sur le récif mais pas âme qui vive. D'année en année et de cyclone en cyclone, l'épave s'est déplacée jusqu'a l'intérieur de l'atoll. On imagine la force des vagues ! 

 

Tout à côté se trouve une carrière de coquillages. Ces tout petits escargots jaunes que l'on trouve dans les colliers. Ils les ramassent dans la terre, loin du rivage. A l'aide de gros tamis, ils en récupèrent de grandes quantités qui sont ensuite vendues aux artisans pour faire les colliers. Ici, c'est une chance d'avoir une mine de coquillages. Avant de rentrer, nous rejoignons le groupe qui est resté a la "piscine", sorte de bassin naturel de 30 mètres de profondeur au bord du lagon. C'est une ancienne carrière de phosphates, qui a été exploitée 4 ans avant que les habitants de Mataiva ne parviennent à faire cesser l'activité. 

 

Nous rentrons à la pension. Il est tôt et avons le temps de partir faire un tour de kayak dans le lagon.

 

Jeudi 21 avril

 

Dans la même journée, nous prenons divers moyens de transport : kayac sur le lagon, vélo jusqu'au village, pick up jusqu'à l'aéroport, où nous choisissons nos places, non assignées, dans la petite avionnette qui dessert les îles et que nous attendons sur le tarmac, devant les rouleaux de l'océan, voiture que nous louons à Papeete, ferry pour rejoindre l'île de Moorea... 

 

Au décollage, nous avons de la chance, le survol de l'atoll se fait sous le soleil, et nous pouvons admirer l'extraordinaire vue de cette couronne de cocotiers, enserrant 70 vasques lagonaires aux eaux turquoises... Un spectacle unique et sublime, magnifique, incomparable... 

 

Nous avons passé sur ce bout de terre, perdu en plein Pacifique sud, un séjour enchanteur, mais nous restons rêveurs quant à ce mode de vie clos sur lui-même, fermé, et limité à la pêche et la coprahculture... Seules, quelques 15 familles composent le paysage des quelques dizaines d'habitants de l'atoll, une cinquantaine d'enfants de la maternelle à la primaire, qui grandiront ensemble, se marieront et perpétueront les traditions de leur île si particulière... 

 

A côté de cette vie endogamique, certains Popa'a ici, métropolitains mutés ou mis à disposition, en manque de culture, n'hésitent pas à aller passer 2 jours à Auckland pour assister à un match des Old Black ou voir l'America's Cup, 2 jours à Santiago pour assister à un concert, ou 3 jours à Hawaï pour découvrir Big Island... 

 

Dans l'avion qui nous ramène "en ville" (à Papeete), une mère commente à sa fille d'une dizaine d'années, qui quitte son île pour la première fois : "nana (au revoir) Mataiva ! Io rana (bonjour) Tahiti ! Tu vois, ici il n'y a pas que des cocotiers, il y a des montagnes... et des maisons, beaucoup de maisons... un port... des églises... des magasins..." Autant de découvertes pour cette enfant...

 

Impression de revenir "à la maison". Sur le ferry, nous retrouvons Julie, la voisine d'Audrey et Tom, instit' spé' en IME elle aussi, qui rentre du travail. Elle vit à Morea et travaille à Tahiti, prenant le bateau tous les jours pour parcourir la vingtaine de km qui sépare les 2 îles. 

 

Une fois débarqués, nous cherchons le bungalow que nous avons loué : Agathe est une copine d'Audrey, une Popa'a elle aussi, et vient de terminer l'installation de cette maison de bois de toute beauté, rapportée en kit de Bali... Un Bouddha trône sous le bananier, et les 3 enfants de nos hôtes partagent avec nous piscine et trampoline... autant dire que nous sommes gâtés ! Mais surtout, ici, on vit dehors : une seule pièce, que borde une immense baie vitrée, ouverte sur une terrasse en bois qui tourne autour du bungalow, et sur laquelle se trouve une cuisine extérieure. Les moustiquaires donnent à nos lits un air de baldaquins.

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On ne peut donner que deux choses à ses enfants : des racines et des ailes. (proverbe juif)

4 jours qu'il souffle. Avec violence. Le maaramu. Décoiffant les cocotiers, ployant les tipaniers, jouant avec les mape. Un vent de folie, chaud et humide, qui empêche le linge de sécher, vrille le hamac, fouette le visage, couche la pluie à l'horizontale, et nous empêche de partir ramer... L'océan enrage, l'océan écume, l'océan se cabre, mousse et blanchit... pour un peu, le bleu se mélangerait presque avec le turquoise, le lagon avec le large, le lointain avec le proche... pas question de partir en paddle, de s'essayer à la pirogue ou à la planche, il n'y en a que pour les kite surf. Tant pis, on renonce à être sportifs. Les lieux, caressés par le maaramu, invitent à la contemplation. A la méditation.

 

Ce matin, nous avons rendez-vous. On avait rencontré Delphine, Julien, et leurs enfants Lola (11 ans), Zacharie (8 ans) et Manu (3 ans) sur l'île de Pâques. Elle est enseignante en français en collège, lui est instit' spécialisé. Ils ont vécu 6 ans en Guyane, et après 4 années en Polynésie, s'apprêtent à partir pour le Chili. Alors, tout naturellement, nous nous retrouvons aux portes ouvertes du lycée agricole de Moorea. Pour les ateliers de présentation de l'établissement (dans le labo de chimie, Salomé a extrait l'ADN du chou fleur), les sports polynésiens (Samuel s'est essayé au lancer de perche de bambou), et le ma'a tahiti, le repas tahitien traditionnel. Dans la même assiette, poisson cru, poulet au lait de coco, porc grillé, uru, taro, chou, patate douce, le tout cuit lentement au four tahitien... et puis des mangues, des papayes, des ananas, des ramboutans, des fruits de la passion, des caramboles, des bananes, des citrons verts et des pamplemousses de la même couleur...

 

L'après midi, nous filons chez les amis, avec l'intention de ne faire qu'une pause, sur le chemin de la plage... c'était sans compter sur le platier récifal (bon, d'accord, dans les Alpes on ne connaît généralement pas ces termes !)... Un paradis composé de coraux et coquillages sublimes, sur lesquels on marche à perte de vue, au bord d'un océan frangé de vert... Face à l'île de Tahiti, aux sommets ennuagés de blanc, océan et lagon rivalisent de lumière et de vivacité, et les enfants ont le loisir de construire des cabanes dans les arbres de tiaré, de pêcher la langouste et le crabe entre les coraux, et de chercher la perle rare parmi les jonchées de coquillages... Les échanges sont vivants et sensibles, le temps s'écoule lentement, quelle chance nous avons !

 

Alors, les racines, on sait un peu où elles sont plantées, c'est vous tous qui nous lisez, et pour les ailes, on essaie d'élargir l'horizon, éperdument...

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Une séparation émouvante

Et voilà, 5 jours d'école riches en échanges et en partage, les enfants nous demandent de revenir saluer les copains la semaine prochaine, après notre séjour dans les Tuamutus. Audrey et Thomas accueilleront d'autres amis, nous avons loué un bungalow dans le coin, et continuerons d'explorer cette petite île enchanteresse... Les enfants retiennent autant les évaluations scolaires que la journée polynésienne organisée pour eux (ukulélé, tressage de feuilles de bananier et de couronnes de fleurs et de feuilles, tambour, chants polynésiens, colliers de coquillages...), et moi, je suis soulagée ! Ils ont, une fois de plus, montré leur capacité d'adaptation, su se nourrir de ce qui leur est donné, et accueillir ce qui nous est offert... Et puis, nous n'avons sans doute pas fini de mesurer les bénéfices de cette semaine particulière, qui est tombée à pic pour préparer les jours d'école en Nouvelle Zélande, dans le cadre de l'échange avec l'école de Brindas... même si, en anglais, ce sera une autre paire de manches !!

 

Ce soir, restau roulotte avec les amis, un régal tout simple, au bord du lagon et le visage dans le vent. Hier soir, sans les enfants, nous avons assisté, au très cosy hôtel Sofitel, à un spectacle de danse tahitienne... paréo, fleurs dans les cheveux et hanches ondulantes... Et aujourd'hui, j'ai accompagné Audrey et les filles à leur cours de danse, une excellente façon de comprendre la Polynésie de l'intérieur, danse, chant tahitien, mime... un bonheur de tous les sens, car les fleurs fraîches des danseuses embaument...

 

Juste pour le plaisir, quelques images de la couleur de l'eau ce matin, avant que le ciel ne se grise de nouveau... A 8h50, j'étais seule avec Audrey sur la plage, seule dans l'eau... Les bungalows sur pilotis sont ceux du fameux hôtel Sofitel, et le poisson, suspendu au bord de la route, est le mahi mahi, variété de daurade et succulent.

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Ici...

Ici, on tutoie les gens qu'on ne connaît pas.

Ici, les maîtresses font la bise aux parents, et serrent la main aux élèves.

Ici, les enfants appellent leurs "potes" des "collègues".

Ici, on peut aller pieds nus à l'école.

Ici, les maisons sont toutes construites sur pilotis.

Ici, on parle français avec un tel accent qu'on ne comprend pas toujours.

Ici, on se nourrit essentiellement de poisson et de coco.

Ici, on joue du ukulélé tous les jours.

Ici, on porte des fleurs fraîches en colliers et couronnes.

Ici, on vit au rythme des cyclones et dépressions tropicales.

Ici, il peut faire très beau, et très moche à quelques kilomètres.

Ici, les coqs grimpent dans les bananiers, et courent sous les pilotis des maisons.

ici, les petites filles savent se déhancher à une vitesse vertigineuse.

Ici, quand le Maraamu (vent du sud) souffle, les cocotiers ploient...

Ici, les arcs-en-ciel, anua-anua en tahitien, sont sublimes...

Ici...

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Galerie photos de Moorea

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Galerie photos plage

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Galerie photos Papeete et l'île de Tahiti

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Galerie photos sur les églises de Tahiti et de Moorea

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En images...

Jusqu'ici, on vous a demandé de nous croire sur parole quand on vous disait qu'on faisait des trucs géniaux, exceptionnels, sublimes, incroyables... dans des paysages de rêve. En voici un premier aperçu. Galerie sur la végétation locale, jardin botanique de Papeete. Le  temps est gris et très venteux, les enfants sont à l'école, Ludo fait un aller retour Moorea-Tahiti pour organiser notre séjour, à partir de dimanche, sur Mataïva, l'atoll des Tuamutus (où nous n'aurons sans doute aucune connexion...), et les photos ont enfin chargé... Alors voilà. J'aurais aimé pouvoir tout légender, mais il y a plein de choses dont je rêve, et que je n'arrive jamais à faire !! Vivement le boulot, au moins, j'aurai du temps !!

 

Sinon, je peux aussi vous parler de notre après-midi au lagoonarium hier : le concept, c'est un trajet en pirogue à moteur jusqu'au "motu" en face, petit îlot planté de cocotiers à hauteur de barrière de corail, à la limite entre les couleurs bleue, verte et turquoise de l'eau, et sur lequel des paillotes ont été aménagées (pour l'ombre... rappelez vous que nous n'avons pas froid !), ainsi que des cordages qui permettent un promenade dans un jardin corallien : le courant est si fort à cet endroit qu'il devient ainsi possible de profiter de la vue des milliers de poissons de toutes les couleurs sans être entraîné, accroché aux cordes... Masques et tubas sont indispensables, ainsi que les sandales, qui permettent de ne pas se blesser sur les coraux, oursins, poissons pierre et poissons scorpions... Et puis, le clou du spectacle, c'est le nourrissage des animaux par Wilfried, incroyable nageur amoureux de son île, et qui a apprivoisé les poissons (si, si !) : dans cette seule bande lagonaire proche de la côte, le nourrissage est autorisé (plus loin, la zone est protégée et les règles, très strictes, interdisent cette pratique). Nous avons ainsi pu nager au milieu d'une faune très nombreuse et variée : mulets par milliers, murènes (dont l'une, apprivoisée, mesure 2 mètres et vient faire des câlins à Wilfried), requins à pointe noire et raies pastenagues, sans compter toutes les autres merveilles dont nous ne connaissons pas le nom... Depuis 20 ans, ces animaux le connaissent et viennent réclamer leurs sardines, à heure fixe, et caresser les curieux qui, comme nous, laissent vite tomber leur appréhension pour jouer dans l'eau et batifoler avec eux. Huguette est une raie enceinte dont les câlins sont très doux, Josette et Juliette nous grimpent dessus, hors de l'eau et de préférence par derrière, et leur contact visqueux a déplu à Salomé, alors que Samuel, après avoir marché par inadvertance sur l'une d'elle, a préféré contempler le majestueux spectacle de leur nage ondulante depuis le bord... Arthur, quant à lui, aurait bien aimé s'accrocher à leur museau pour pouvoir nager avec elles sur plusieurs dizaines de mètres, comme le fait Wilfried, mais il lui faut d'abord grandir encore un peu, et se débarrasser de ses brassards... Pour moi, pas rancunière (ma piqûre, au Honduras, reste un souvenir douloureux...), après m'être assuré que leurs dards leur avait bien été enlevés, j'ai adoré l'expérience ! Un moment assurément fort du voyage.

 

Le matin, sans les enfants, nous étions allés visiter le luxueux hôtel Intercontinental, où se trouve, dans un cadre de toute beauté, harmonieux et raffiné, la clinique des tortues, où viennent spontanément se faire soigner les animaux malades du lagon... Un spectacle majestueux que de les voir évoluer dans l'eau turquoise ! Et puis, nous avons aussi assisté à un drôle d'échange, dont l'idée même nous déplaisait fortement, mais dont la vue nous a impressionnés ! Au Dolfin Center de l'hôtel, des dauphins apprivoisés batifolent dans l'eau avec des touristes en maillot de bain, sautant, virevoltant, se laissant caresser, faisant signe de la dorsale...

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Maatea, une école (presque) les pieds dans l'eau

Rentrée scolaire des vacances de Pâques, lundi, 7h30. Nous accompagnons Margot et Zoé à l'école avec leurs parents et nos enfants... sous le préau qui se trouve au centre des bâtiments colorés au toit de tôle, les enfants se retrouvent. Certains sont pieds nus, les filles ont une fleur à l'oreille, chacun a sa bouteille d'eau dans le cartable, les "r" roulent dans la bouche... Ia orana ! Bonjour ! Maeva ! Bienvenue! La directrice nous accueille, et a tôt fait de répartir les enfants dans leurs classes d'âge. Samuel panique, refuse d'y aller, demande ce que nousferons "entre adultes" (après 5 mois passés ensemble jour et nuit)...et va s'installer dans la classe des CM1, pas trop fier quand même, mais Zoé lui a dit que Wayan et Hina Tea étaient très belles... Le soir, emballé et fier d'avoir montré à sa classe notre blog de voyage, il prépare un exposé pour la fin de la semaine, et affirme aussi que les règles polynésiennes des échecs ne sont pas les mêmes qu'en France !!! Salomé devient silencieuse, serre très fort ma main... et reviendra, le soir, en disant : "c'est bizarre, dans maclasse (notez le possessif), ils savent pas ce qu'est un poème ou une poésie, mais eux, ils ont déjà appris les multiplications..." Quant à Arthur, tranquillement, il intègre une classe avec le sourire, et nous montrera le soir son impressionnante production artistique, parlant des pyramides mayas de Tikal, et des ateliers pyramides qu'il a ainsi initiés dans sa classe. La cantine est un grand moment de partage et de découverte aussi, et à 15h, ce sont 3 enfants ravis que nous récupérons...

 

Pendant ce temps, nous avons exploré la moitié du littoral de cette petite île calme et verdoyante, ses 2 baies aux eaux pures et limpides (baie de Cook et baie de Opunohu), la plantation d'ananas qui s'étage après le lycée agricole, la fabrique et distillerie de jus d'ananas, les petites églises coloniales construites sur les emplacements religieux ancestraux des iliens, les sites archéologiques de la vallée d'Opunohu, avec ses "maraes" et ses "ahus", plateformes cérémonielles, le belvédère, situé un peu en hauteur, dans une végétation tropicale dense et prolifique, les bungalows de l'hôtel Sofitel, dont les pilotis plongent directement dans l'eau turquoise du lagon, les trous des tupus, crabes des cocos qui creusent des trous énormes dans les jardins et les cocoteraies, grouillent sous les pas, meurent écrasés sous les pneus des voitures comme les grenouilles en France, les geckos que nous retrouvons, et qui se nourrissent parfois des énormes cafards et blattes volants qui pullulent sur l'île, ses goyaves, ses mangues, ses fleurs de tiaré, ses mape (sorte de châtaignes), sesurus, sa vanille, les colliers de fleurs pour l'accueil, les colliers de coquillages pour les adieux, les couronnes de fleurs pour les événements importants, les youcoulélés...

 

Et ce matin, avec Audrey, nous partons en rando au col des 3 cocotiers. Les cyclones successifs ont depuis longtemps déraciné lesdits cocotiers, mais les 4h30 de marche, entre montagne et mer, sont sublimes. Nous devenons liquides, pataugeons dans la boue, l'écrasante chaleur exacerbe les odeurs des fruits et des fleurs, parfois violente, les fougères arborescentes s'étagent sous les mape et les hibiscus, les fleurs amazoniennes trouvent ici leur version pacifique, le temps est couvert, les nuages s'accrochent aux pics déchiquetés et vertigineux qui composent le paysage volcanique de l'île, la caldeira disparaît sous une intense végétation, généreuse et prolifique, et, quand le regard s'échappe des bras verts, il s'éblouit sur la ceinture lagunaire de Moorea, s'accroche aux vagues écumeuses qui se brisent sur le récif corallien, se noit dans l'intensité du bleu de l'horizon... Au retour, nous sommes pétris de boue, faisons corps avec cette nature à la fois tellurique et toute d'eau faite, sensuelle et extrême...

 

Retour d'école. Les enfants dévorent sur la grande terrasse abritée, devant le lagon que les nuages ont peint en gris. La pluie tambourine sur le toit de tôle, les petits voisins appellent, ils ont péché une murène, il y a aussi des 100 pieds (et non des 1000pattes) dans le jardin, et leur piqûre est douloureuse... Une brochette d'enfants crapahute d'une maison à l'autre, du hamac à la terrasse, de l'herbe à la sac line, de la pirogue à balancier aux cocotiers... ils pêchent, font de l'équilibre, jouent à cache cache, préparent un spectacle de danse tahitienne... finalement, seule, Zoé dansera pour nous ce soir, en brassière et paréo, coquillages autour du cou et fleurs dans les cheveux... pétillante et lumineuse, merci Zoé !

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Maatea

C'est étonnant comme on peut avoir l'impression de se connaître depuis longtemps... L'accueil est chaleureux, les sourires éclatants, les conversations évidentes, le mode de vie proche du nôtre, la grande maison traversante est ouverte (comme ses occupants) sur le jardin qui se termine sur le lagon turquoise, devient océan d'un bleu profond, puis barrière de corail, et de nouveau une eau verte et limpide... Les relations sont simples et spontanées, les enfants se retrouvent... Est-ce que vraiment, il y a 2 semaines, avant l'île de Pâques, nous ne nous connaissions pas ? Thomas est enseignant spécialisé en IME, et termine sa 2ème année scolaire ici. Il semble que les profs et instits soient très représentés parmi les professionnels mutés ici, avec... les militaires ! Audrey a pris une dispo chez Air France, où elle est informaticienne. Zoé termine son CM2, et Margot, qui a soufflé hier sa 7ème bougie, est au CP... Les filles nous laissent spontanément leur chambre (et leur moustiquaire...), et s'installent sur la mezzanine, avec nos loustics. Il faut dire que l'accueil ici n'est pas un vain mot : une autre famille de tour du mondistes s'est liée d'amitié et a séjourné à Moorea, des copains sont partis quelques heures avant que nous n'arrivions, d'autres arriveront à la fin du mois, puis d'autres encore, en mai... Une maison pleine de couleurs et de vie, où il fait bon vivre ! 

 

L'approche de l'île en ferry est somptueuse, et permet d'apprécier le relief accidenté de montagnes couvertes d'une végétation luxuriante, des pics acérés et des crêtes vertigineuses, que nous avons la chance d'admirer sans son habituel chapeau de nuages...

 

Nous explorons le lagon et ses eaux calmes (aujourd'hui) et nuancées avec divers instruments : planches de paddle (debout) et de voile (assis), nous visons le chenal entre les patates de corail, car il y a très peu de fond, et l'on accrocherait vite la planche sur les récifs émergeants ! Nous découvrons toute une faune, variée, multicolore et peu farouche, facilement observable depuis la planche, tant l'eau est limpide... Arthur et Salomé ont leurs masques et se régalent, même s'ils sont impressionnés dès que la profondeur de l'eau s'accentue, changeant le turquoise en bleu intense. Samuel a préféré rester sur le tapis de corail du bord, lançant patiemment un hameçon dans l'eau, et observant les poissons tourner autour de son appât constitué... d'une tête de poisson... 

 

L'après midi,  nous empruntons leur voiture aux amis pour partir en direction du nord, jusqu’à la plage dite du Sofitel : notre première carte postale... Sable blanc sous les cocotiers, eau turquoise jusqu'à la barrière de corail, puis bleu profond... On se baigne, on observe de nouveau des poissons variés et très colorés, qui viennent se faire caresser, nous chatouiller, et poser devant notre toute nouvelle caméra... L'eau est très chaude, les enfants s'enhardissent, nagent davantage, plus loin, et se risquent à ne plus seulement longer les patates de corail, mais à s'engager au dessus de véritables récifs, où le monde qu'ils découvrent est si fascinant qu'ils en oublient d'avoir peur... Et nous, nous retrouvons l'environnement (et le plaisir !) rencontré aux Galapagos...

 

Demain, c'est la rentrée scolaire. Ici, toutes les 5 semaines, il y a des vacances... nous irons tous à l'école à 7h30 (la journée se termine à 15h30) pour rencontrer la directrice, et voir comment envisager la possibilité de journées d'école pour nos petits globe trotters...

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Gauguin en goguette

Après notre déception de n'avoir pu visiter le musée Gauguin jeudi, notre difficulté à organiser notre séjour en Polynésie (tout est terriblement cher ici, et notre manque d'anticipation n'aide pas), à supporter la chaleur et la touffeur moites (il est 22h et il fait encore 39°...), nous quitterons demain matin Tahiti pour sa proche voisine, l'île de Moorea... Papeete n'est pas une beauté des mers du Sud comme on les imagine, et Corto Maltèse lui-même, sous la plume d'Hugo Pratt, ne s'y serait sans doute pas attardé sans une bonne raison... Nous avons longuement observé le ballet des énormes bateaux de croisière (Jusqu'à 3 500 voyageurs), qui mouillent à côté des ferrys inter-îles, voiliers, catamarans... et se font chatouiller la coque par les piroguiers, visité le musée de la perle, observé les tresseuses de couronnes de fleurs fraîches, les gousses de vanille locales, acheté du monoï, découvert les typiques roulottes, qui s'installent le soir sur le front de mer, et où les polynésiens viennent se restaurer à moindre frais, et avons testé le cinéma, profitant de la salle climatisée pour voir Kung Fu Panda 3 !

 

Demain, en une demi heure de ferry, nous rejoindrons l'île de Moorea, où nous sommes attendus par Audrey et Thomas... Cette petite merveille parmi les "îles hautes", c'est à dire non encore effondrées en leur centre pour former un atoll, n'est pas plus facilement accessible sans voiture que ne l'est Tahiti, mais les enfants pourront y passer un jour ou 2 à l'école avec Zoé et Margot, et ses 2 baies sont, parait-il, sublimes... sans compter que dans les eaux de son lagon, il est possible de nager avec des raies, des dauphins à nez de bouteille et, entre août et octobre, avec des baleines à bosse...

 

Et puis, nous partirons jeudi passer une semaine sur l'atoll de Mataiva (cherchez des photos sur internet !).

 

On ne peut toujours pas illustrer de quelques photos l'ambiance polynésienne : après une semaine sans connexion sur l'île de Pâques, les photos chargent toujours.... Et nous avons acheté une caméra aujourd'hui...

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Snorkeling

Une expérience scientifique...

Au milieu du lagon, des poissons de toutes les couleurs et des coraux, même avec un tuba dans la bouche... Salomé n'arrête pas de parler !!

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Tahiti, l'île vertigineuse

Nous continuons l'exploration de cette petite île en forme de huit, dont le centre est occupé par des montagnes et volcans culminant tout de même à plus de 2 000 mètres d'altitude, tandis que leur pied plonge directement dans un lagon aux eaux claires, séparé de quelques dizaines de mètres du récif corallien sur lequel viennent se briser de belles vagues, pour la plus grande joie des surfeurs du monde entier. Nous retrouvons sur les flancs montagneux une végétation tropicale et luxuriante proche de celle de l'Amazonie, très dense et fleurie, mais avec des plantes de Malaisie, des Philippines, d'Indonésie... plus proches d'ici. Nous retrouvons aussi les moustiques... mais il paraît qu'une énorme épidémie de chikungunya est derrière nous. Cascades, grottes, lianes,... côtoient directement les bleus profonds de l'océan. Alors que nous cueillions des urus, ces fruits de l'arbre à pain rendus célèbres par les naufragés de la Bounty, pour les cuisiner demain, une dame s'approche avec ses 2 petits enfants et nous invite à venir passer la journée de demain chez elle.... C'est simple, l'accueil, en Polynésie !

 

Après le passionnant et très documenté musée de Tahiti et de ses îles, hier, nous rêvions de visiter aujourd'hui le musée Gauguin... la déception est grande, nous avons traversé spécialement la moitié de l'île, et il est fermé depuis 4 ou 5 ans, sans date de réouverture...

 

Heureusement, nous avons acheté des masques, et découvrons une plage de sable noir très différente de celle où nous avons pu observer des coraux et des poissons bleus, rayés ou transparents hier : nous nous baignons à l'embouchure d'une petite rivière dans le lagon, l'eau y est douce et chaude, de très nombreux polynésiens goûtent également le plaisir du lieu, des enfants sautent des arbres... un régal, bien loin des images de carte postale de Tahiti.

 

Ici, les vacances scolaires se terminent dimanche.

Etonnamment, nous vivons ici un dépaysement plus grand que celui de l'Amérique latine... Nous connaissons mal l'histoire de ces archipels, qui n'ont de français que le camembert...

 

Les photos de Tahiti ne sont pas encore chargées, en revanche, nous avons réussi à créer des galeries pour celles de l'île de Pâques, dans 2 articles différents... pardon pour la lourdeur !

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Papeete

D'un coup d'ailes, changement d'île !

 

Nous voici arrivés à Papeete, capitale de Tahiti, des fleurs de tiare et d'hibiscus, du monoï, de la culture de l'huître perlière et des tikis, ces statues de pierre cousines des moais pascuans. À la descente de l'avion, directement sur le tarmac, un souffle chaud et humide nous fait suffoquer, une moiteur collante nous assaille, alors qu'il est minuit et que la saison humide vient de s'achever, avec ses dépressions tropicales et ses cyclones... Qu'est-ce que ce sera en pleine journée ? Nous quittons précipitamment les 4 familles avec lesquelles nous avons noué des liens ces derniers jours, avec l'heureuse perspective de revoir au moins Audrey et Thomas sur Morea. Clorinda, dont nous avons loué l'appartement pour nos 5 premiers jours ici, nous réserve un accueil polynésien : colliers de fleurs fraîches et odorantes à l'aéroport ! Le mythe prend vie, des images s'ébauchent, l'air exhale une puissante odeur d'iode, l'aéroport a été gagné sur l'océan, l'immeuble s'appelle "le petit Gauguin"...

 

Les journées qui suivent les longs trajets de nuit ne sont jamais faciles... Nous arpentons la promenade aménagée en front de mer, rêvons sous ses palmiers et hibiscus, flânons devant les pirogues polynésiennes, les voiliers, les catamarans, les cargos et porte containers qui griffent la peau de l'eau, admirons les tatouages de chacun (jusqu'au visage tatoué... mais cette question mériterait un long article en soi), découvrons la présence très importante d'une communauté chinoise, observons l'artisanat local, fait de coquillages, de perles, de raphia tressé, de différentes huiles de monoï, et dégustons notre premier tartare de thon rouge sur le marché, notre premier poisson cru au lait de coco, accompagné de taro, un fruit local succulent, d'uru, le fruit de l'arbre à pain, et de patate douce...

 

La langue tahitienne ne ressemble à rien de ce que nous avons déjà entendu, elle est très belle, et les vahinées ici portent toutes la fleur dans les cheveux.

 

La Polynésie ne nous avait jamais particulièrement attirés, il aura fallu l'opportunité de ce tour du monde pour envisager de s'y arrêter quelques semaines... et découvrir l'incroyable richesse de sa culture et de ses lagons, îles hautes, volcans, atolls, récifs coralliens... pour succomber ! Cet ensemble immense, poignée de confettis jetée sur le bleu profond de l'océan, compte 5 archipels (la Société, avec les îles du Vent et les îles Sous-le-Vent, l'archipel des Tuamotu, celui des Gambier, celui des Australes et enfin, celui des Marquises) regroupant, au total, 118 îles. Si l'île de Pâques, chilienne, est soumise à l'autorité nationale, elle est également régie par un Conseil des Sages exclusivement composé de rapanuis. La Polynésie française, quant à elle, prend cette appellation en 1957, avec la loi cadre Deferre, qui fait disparaître le nom d'Établissements Français d'Océanie (EFO) en 1946 au profit de celui de Territoires d'Outre Mer (TOM). C'est la constitution de la IVème République qui avait transformé les colonies en TOM...

 

Tahiti se situe à

8 800 km de Tokyo

7 500 km de Santiago

4 500 km de Honolulu

1 300 Km de Auckland

6 700 Km de Los Angeles

5 700 Km de Nouméa

5 700 Km de Sydney et...

18 100 km de Paris !!!

 

Malgré les distances, ici, c'est bien la France... On trouve du fromage et de la charcuterie dans les commerces, et l'absence du port de ceinture de sécurité en voiture est susceptible d'être verbalisé ! On trie ses déchets, mais ils sont envoyés en France pour être recyclés !!! La religion est très prégnante dans la vie quotidienne, catholiques et protestants se partagent la ferveur populaire avec les évangélistes, les adventistes, témoins de Jéhova, pentecôtistes, mormonds...

 

et les connexions internet sont sensiblement meilleures que celles de l'île de Pâques, rendant plausible l'hypothèse de réussir un jour à vous en envoyer les photos...

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