Rapa Nui

Vendredi 1er avril

 

Je reprends le carnet de voyage rédigé au jour le jour depuis notre arrivée, le 27 mars, dimanche de Pâques, sur l'île de Pâques... Ce bout émergeant de rocher, point culminant d'une Cordillère sous marine, le plus éloigné au monde de tout continent, n'a pas de connexion internet suffisante pour nous permettre d'accéder au blog... mais ce soir, amertume et déception : je ne retrouve plus les lignes rédigées quotidiennement, il semble que nous ayons perdu tout le texte qui essayait de rendre compte de cet extraordinaire que nous vivons ici, à la rencontre des rapanui et de leur culture...

 

Samedi 2 avril

 

Iorana (salut en rapa nui)

 

L'océan Pacifique est partout, puissant. Les émotions éprouvées ici, sur cette île aux paysages restés sauvages, sont très intenses. Régulièrement, les larmes nous montent aux yeux, devant un site plusieurs fois centenaire où les moais, ces géants de pierre, sentinelles indéfectibles d'une culture encore incomprise, semblent avoir figé le temps... moais debout, moais couchés, moais penchés, le nez dans l'herbe, les lobes des oreilles courts ou allongés, de buste ou de pied, le visage affiné ou encore grossier, érigés ou non encore extirpés de leur lit de pierre, dressés sur leurs autels cérémoniels (ahus) ou abandonnés sur le chemin entre carrière et destination finale, avec ou sans chapeau... tout un peuple sculpté de pierre volcanique et de tuf rouge qui vient parler aux pascuans de leurs ancêtres, sans toutefois révéler encore tous leurs secrets... Il n'est pas un sentier de l'île qui ne découvre les beautés mystérieuses d'un passé turbulent et parfois douloureux, mais riche d'une culture unique, bien que métissée (la Polynésie n'est pas loin...)

 

Nous campons. Directement au bord de l'océan et de ses rouleaux qui viennent se fracasser bruyamment en gerbes d'écume impressionnantes, un grand pré accueille les dizaines de petites tentes igloos des routards du monde entier. On y parle toutes les langues, avec une prépondérance du français. L'ambiance est très sympa, et même communautaire : échanges en tous genre (expériences, adresses, bons plans, nourriture, location de matériel en commun, mutualisation...). A notre arrivée, nos enfants sont les seuls : les voyageurs en partance nous offrent nourriture, masques et tubas, tente... Puis arrivent d'autres familles françaises : les polynésiens ou métropolitains expatriés à Tahiti profitent des vacances de Pâques pour voyager dans "le triangle" : île de Pâques, Hawaï, Nouvelle Zélande. C'est ainsi que nous sympatisons avec Audrey et Thomas, et leurs 2 filles, Zoé et Margot. Les enfants ne se quittent plus, et ils nous ont très spontanément proposé de nous héberger à Morea, l'une des îles que nous avions le projet de visiter, où leur maison se trouve devant le lagon, où il est possible de nager avec des raies et des requins... Les enfants devraient même pouvoir y être scolarisés un jour ou deux...

 

Dimanche 3 avril

 

Sur l'île,  goyaves, bananes, eucalyptus, hibiscus, palmiers et avocatiers... une flore somme toute assez pauvre : la terre est de roche volcanique, l'eau est salée,  le vent violent et permanent... plus de 3 000 chevaux sauvages tendent à envahir l'île, restée vierge et authentique. Leurs carcasses blanchissent au soleil au pied des moais... Pas de réseau routier (une seule route, asphaltée depuis 1996 seulement, sinon, des pistes défoncés, poussiéreuses par temps sec, boueuses par temps humide), pas d'eau potable en dehors de Hanga Roa (seule ville de l'île, qui compte environ 5 600 habitants), peu de commerces, tout arrive du continent par bateau ou avion, quant aux connexions wifi, elles sont plus qu'aléatoires... L'aéroport a cependant longtemps été un habitué du Concorde...

 

Ce matin, une randonnée à cheval inoubliable au sommet du volcan Terevaka, point culminant de l'île,  avec ses 507 mètres d'altitude. 3 heures de chevauchée dans un paysage sauvage et sublime, sorte de steppe très douce entourée partout du bleu profond de l'océan. Ondulations des herbes, ondulations de l'eau, ondulations du ciel...

 

Jeudi soir, spectacle de musique, chants et danses traditionnels : une culture très nouvelle pour nous, métissée de rapa nui, de maori et de tahitien ! Un mélange de rites tribaux et guerriers, de vahinées... ondulantes... un culte du corps bien différent des dernières danses appréciées, en Bolivie...

 

Mardi et mercredi, nous avons loué une voiture pour explorer l'île dans ses moindes recoins, nous arrêtant tous les 100 mètres pour découvrir un site archéologique, admizrer un point de vue sur le Pacifique... jeudi, lever avant 7h pour aller voir le soleil se lever à l'est, sur le site des 15 moais alignés, et le soir, pique nique sur le site des 7 moais à l'ouest, afin de voir le soleil plonger dans l'océan entre eux... des moments puissants.

 

Visite du musée anthropologique de Hanga Roa : l'explication de sa situation géographique exceptionnelle, de sa composition géologique (point culminant d'une Cordillère sous marine) et de son histoire mouvementée, l'unique moai féminin, le seul oeil de corail et d'obsidienne d'un moai trouvé au pied d'un ahu, ses statues rapa nui, ses tablettes rongo rongo, cette écriture hiéroglyphique non encore déchiffrée sur laquelle nombre d'archéologues se sont cassé les dents... la présence des travaux et recherches d'Alfred Métraux... les représentations des pétroglyphes et peintures rupestres désormais englouties dans les nombreuses grottes des falaises, ou tellement érodés qu'ils sont à peine discernables...

 

Le site sacré d'Orongo et la compétition de l'homme-oiseau 

La carrière de moais 

 

Tous les jours, nous nous sommes baignés avec des tortues de mer, venues manger des algues dans nos mains. Joie et émotion ! Les enfants nous tannent pour que nous achetions une go pro, ou un appareil photo qui puisse aller sous l'eau...

 

Entrainement quotidien des pirogues polynésiennes, uniques en leur genre, avec 6 rameurs et un unique balancier à droite, dont l'équipe rapa nui s'enorgueillit de plusieurs titres mondiaux. Spot de surf et de plongée, visibilité à 40 mètres, clarté des fonds sous marins, coraux stupéfiants... Artisanat de coquillages.

 

Mais à côté de ces aspects merveilleux, nous nous questionnons aussi sur l'isolement insulaire. Ici, tout le monde se connaît, et la terre la plus proche est à 3 700 km... Comment vivre une vie entière dans cet entre soi endogamique ? Comment construire une ouverture aux autres dans un si petit univers, un rapport à la différence ?

 

Lundi 4 avril

 

Ce soir nous prenons l'avion à 23h, et, après 6h de vol, atterrissons à Papeete à minuit !!! Nous aurons alors 12h de décalage horaire avec la France...

Écrire commentaire

Commentaires: 3
  • #1

    janine ganivet (mercredi, 06 avril 2016 00:03)

    Mon dernier reve serait la polynesie, je vous envie alors profitez un max. Et si par hasard vous connaissez l origine des tikis racontez moi l histoire. J aime bien ces petites statuettes, a l epoque j en avais trouve des noires, des vertes et l on m en avait meme rapporte une rose de papeete msis je ne connais pas l histoire des differents dessins representes. Bisous a vous 5 et continuez a me faire rever par vos recits janine

  • #2

    vio (mercredi, 06 avril 2016 07:56)

    buenos dias! oh la la, joie de trouver ce matin vos commentaires.. que je n'ai pas le tps de lire avt de partir! A tt à l'heure... Et bonne arrivée à thaiti! bisessssssssssssssss

  • #3

    laurence (vendredi, 08 avril 2016 11:24)

    Elles sont magnifiques vos photos de l'île de Pâques, elles font rêver !!!
    Bonne continuation sur la Polynésie et pleins de bisous à vous 5.
    Laurence